L'apothicairerie

Orviétan

Pot à pharmacie « E[luctai]re orvietan » © Mairie de Toulouse, musée Paul-Dupuy, Inv. 7103, cliché M.-P. Chaumet, avec leur aimable autorisation

L. Guyot (sculpt.), d’après Watteau, Le Marchand d’Orviétan, estampe, 1788, Gallica

« Orviétan ! Orviétan ! Achetez mon orviétan ! » pouvait-on entendre dans les villes, dans les bourgs et dans les villages de France aux 17e et 18e siècle. Ce remède populaire fut inventé par Jérôme Ferrante, apothicaire natif d’Orvieto, d’où il tira le nom du médicament. Comme l’atteste comiquement Molière, il était supposé être une véritable panacée :

« Mon remède guérit, par sa rare excellence,
Plus de maux qu’on n’en peut nombrer dans tout un an :
La gale, La rogne, La teigne, La fièvre, La peste, La goutte, Vérole, Descente, Rougeole.
Ô grande puissance de l’orviétan !
»

L.-M. Bonnet (sculpt.), d’après J.-P. Caresme, Le marchand d’Orviétan de campagne, 18e siècle, Gallica

L’orviétan fut d’abord considéré comme un véritable remède, vendu notamment chez les chirurgiens et les dentistes (sous motif de « puanteur d’haleine » , ou pour supporter la douleur par l’opium qu’il contenait) ; dentistes qui tiraient une partie de leurs revenus de la vente de produits et remèdes dentaires : dentifrices, poudres, élixirs et autres remèdes. La fabrication et la vente d’orviétan était très encadrée par le pouvoir, qui mit en place de nombreuses autorisations légales : privilège de la composition de l’orviétan, privilège de le débiter (ou de le vendre), privilège d’inspecter les opérateurs, dentistes, chirurgiens, charlatans, marchands… toute personne susceptible de gagner de l’argent sans être munie d’une autorisation.

A. Pougin, Dictionnaire historique et pittoresque du théâtre et des arts qui s’y rattachent…, Paris, Firmin Didot, 1885, Bibliothèque de Toulouse, Res. B XIX 60

L’orviétan connut un succès considérable, mais dont la durée fut aussi brève que son efficacité. Son nom tomba alors dans une sorte de mépris, et le nom de marchand d’orviétan devint synonyme de charlatan. Des marchands de drogues prétendues médicales s’installaient sur les places publiques et dans les foires et attiraient les badauds au moyen de farces, de musique ou de spectacles d’animaux pour vendre leurs produits. Ce faux médicament n’est plus aujourd’hui cité que comme un exemple de charlatanisme médical.

Sa composition fantaisiste intégra à loisir entre 26 et 54 ingrédients, dont la thériaque et des vipères sèches garnies de leur cœur et de leur foie. On dénombre pas moins de 35 recettes différentes.