Les œuvres et leurs créateurs

Corset en peau d’homme

Livre pauvre réalisé par Angèle Casanova (poétesse) et Mylène Besson (artiste)

Mylène Besson : « Angèle me parle de ce nouveau projet de livre pauvre. Nous décidons que je commencerai. La découverte de papiers artisanaux mangés par des moisissures roses est le déclencheur. Je les rehausse avec de l’encre, déchire les feuilles aux endroits fragiles pour construire deux séries de petits livres, recouverts d’un vernis afin d’en assurer la conservation et de fixer les paysages dessinés par l’eau. »

Angèle Casanova : « Dans le salon de Sarah, Mylène me confie ses livrets. Le papier qu’elle a utilisé a pris l’eau dans une grange. Un mois après, les pages de tous les livrets font bloc. L’eau travaille toujours, de l’intérieur. »

Ce texte, inséré dans le livre pauvre, intègre la démarche de création au cœur même du projet. Mylène Besson confie à Angèle Casanova deux séries de livres pauvres, que celle-ci, désemparée suite à leur destruction irrémédiable, rassemble en une seule série. Angèle Casanova écrit un texte à plusieurs niveaux de lecture, miroir de la multiplicité des formats proposés par Mylène. Ce projet parle d’amitié, de confiance. Il forme une manière de dossier d’enquête sur l’« accident des livres pauvres colmatés ». Le texte explique ce qui s’est passé, et les livrets de Mylène deviennent des preuves à l’appui, numérotées par l’enquêteur, qu’on devine archiviste. Angèle utilise, pour créer le format final du livre pauvre, des dossiers A4 d’archives du début du 20e siècle, récupérés dans une poubelle suite à leur reconditionnement. Archiviste, elle utilise l’esprit et la matière de son métier. Ce livre ressemble physiquement à un dossier d’archive : son fermoir est une sangle d’époque, son titre coule.

A. Casanova et M. Besson

Angèle Casanova

Angèle Casanova n’existe pas. Elle est née de l’esprit de celle qui tire les ficelles et a vécu la vie d’Angèle. Angèle ne vit pas, Angèle est un nom qui dissimule l’autre, celle qui vit, écrit, et signe : Angèle.
Ça marche comme ça, pour elle :
Elle se dit, pourquoi ne pas l’écrire, ce livre ? Et elle l’écrit.
Elle se dit, pourquoi créer toute seule ? Et elle crée à deux, en variant les modalités de collaboration.
Elle se dit, pourquoi ne pas créer avec cet artiste ? Et elle l’invite.
Angèle Casanova a réalisé de nombreux livres pauvres et propose six collaborations en tant qu’auteure ou plasticienne pour la collection « L’eau et les rêves ».
Son site : http://gadinsetboutsdeficelles.net/

Mylène Besson

Mylène Besson, peintre née en 1961, vit et travaille à Chambéry.
Le rapport au monde dans toutes ses dimensions : intimes, fantasmées, sociétales est le sujet de son questionnement. Avec Pierre Leloup, son compagnon décédé en 2010, ils ont rencontré plusieurs écrivains et poètes, en particulier Michel Butor, Bernard Noël, Pierre Bourgeade, Fernando Arrabal, et, avec lesquels elle collabore, réalisant plus de 160 livres d’artiste à ce jour. Le travail de peintre ou d’écrivain est très solitaire, le livre d’artiste est un entre-deux solitude, très intime car il faut se jeter à l’eau de l’autre.
« Faire des livres, peindre, dessiner, c’est agir, c’est transformer le contact, le frottement de mon corps au monde. »
Son site : https://mylenebesson.net/